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DOMMAGE OUVRAGE : l’indemnisation versée par l’assureur DO, au vendeur, emporte obligation pour l’acquéreur de faire les travaux, dès lors qu’il a bénéficié d’une réduction de prix au moins équivalente à l’indemnité !

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En substance :

Une cour d’appel qui constate que l’acquéreur s’est vu consentir une réduction du prix de vente au moins équivalente à l’indemnité versée aux vendeurs par l’assureur de dommages-ouvrage et qu’aux termes de l’acte de vente, le vendeur a déclaré que l’assureur lui avait versé l’indemnité mais ne pas avoir fait exécuter les travaux, qui restaient à la charge de l’acquéreur, ce que celui-ci acceptait expressément, fait, ainsi, ressortir que, selon la convention des parties à l’acte de vente, l’indemnité d’assurance a été transférée à l’acquéreur, qui devait effectuer les travaux pour laquelle elle avait été versée. Elle peut en déduire que l’acquéreur a acquis la qualité d’accipiens à l’égard de l’assureur de dommages-ouvrage, de sorte qu’il doit lui restituer les indemnités non affectées à la réparation de l’ouvrage. 

Pour aller plus loin :

La SCI Val des cigales a fait construire une maison d’habitation, après avoir souscrit une assurance DO auprès de MMA IARD, qu’elle a vendue en l’état futur d’achèvement à M. et Mme [D]. 

Se plaignant de désordres affectant un mur de soutènement, M. et Mme [D] ont assigné la société MMA IARD, qui a été condamnée à leur payer une provision de 175 000 euros à valoir sur le coût des travaux de reprise. M. et Mme [D] ont vendu la maison à M. [E].

La société MMA IARD a assigné M. [E] aux fins de remboursement d’une partie des sommes qu’elle avait versée à M. et Mme [D] et qui n’avait pas été affectée aux travaux de réparation. 

M. [E] fait grief à l’arrêt de le condamner à rembourser la somme de 136 633 euros à la société MMA IARD, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 15 novembre 2011, alors :

1°/ que l’action en répétition de l’indu ne peut être engagée que contre celui qui a reçu le paiement ou pour le compte duquel le paiement a été reçu ; qu’en l’espèce, l’assureur  a versé aux époux [D] une somme de 175 000 euros aux fins de réaliser les travaux réparatoires et que ceux-ci ne les avaient pas fait réaliser ; que M. [E] n’ayant reçu aucune somme provisionnelle de la part de l’assureur, celui-ci n’était pas fondé à agir contre lui en répétition de l’indu, fût-il nouvel acquéreur du bien immobilier assuré en dommages-ouvrage ;

 

2°/ que la transmission du bénéfice de l’assurance dommages-ouvrage au nouvel acquéreur du bien immobilier n’emporte pas cession des éventuelles créances détenues par l’assureur contre le maître d’ouvrage initial au nouveau maître de l’ouvrage, sauf à ce que le contrat de vente ait expressément prévu le transfert de l’indemnité d’assurance à l’acquéreur ; En l’espèce, le contrat de vente du 28 mai 2009 ne prévoyait aucun transfert de l’indemnité à M. [E] puisque, bien au contraire, les vendeurs indiquaient « conserver la maîtrise tant physique que pécuniaire de la procédure en cours, faisant leur affaire personnelle des conséquences et du bénéfice pouvant en résulter pour les parties »

En déduisant la qualité d’accipiens de M. [E] à l’égard de la société MMA du seul transfert de la qualité de bénéficiaire de l’assurance dommages-ouvrage, sans constater par ailleurs que l’indemnité versée en exécution de l’assurance DO aurait été transférée à l’acquéreur, la cour d’appel a violé l’article L. 242-1 du code des assurances.

3°/ Les conventions n’ayant d’effet qu’entre les parties contractantes, un tiers ne peut être lié par un contrat ni davantage s’en prévaloir, sauf à pouvoir invoquer une inexécution dommageable pour lui-même. En l’espèce, l’acte de vente du 28 mai 2009 ayant prévu une réfaction du prix à charge pour M. [E] de réaliser les travaux du mur de soutènement ne concernait que les époux [D] et M. [E] en leurs qualités respectives de vendeurs et d’acquéreur, à l’exclusion de la compagnie MMA, tiers au contrat de vente. Dès lors, en retenant que l’assureur était « en droit d’agir en répétition contre l’acquéreur de l’immeuble, (…) seul bénéficiaire de l’assurance dommages-ouvrage » motif pris de ce que les vendeurs, bénéficiaires de l’indemnité, avaient « consenti à l’acquéreur une réduction du prix de vente du bien immobilier au moins équivalente à l’indemnité versée qui permet de satisfaire à l’obligation d’affectation » quand les stipulations du contrat de vente ne pouvaient être invoquées à son profit par la compagnie MMA, la cour d’appel a violé l’article 1165 devenu 1199 du code civil. »

 

Réponse de la Cour :

Par motifs propres et adoptés, la cour d’appel a constaté que l’acquéreur s’était vu consentir une réduction du prix de vente au moins équivalente à l’indemnité versée aux vendeurs par l’assureur de dommages-ouvrage et qu’aux termes de l’acte de vente, le vendeur avait déclaré que l’assureur lui avait versé la somme de 175 000 euros mais ne pas avoir fait exécuter les travaux, qui restaient à la charge de l’acquéreur, ce que celui-ci acceptait expressément. 

Elle a, ainsi, fait ressortir que, selon la convention des parties à l’acte de vente, l’indemnité d’assurance avait été transférée à l’acquéreur, qui devait effectuer les travaux pour laquelle elle avait été versée.

Les tiers pouvant invoquer à leur profit comme constituant un fait juridique la situation créée par un contrat auquel ils ne sont pas parties, la cour d’appel a pu en déduire que M. [E] avait acquis la qualité d’accipiens à l’égard de l’assureur, de sorte qu’il devait lui restituer les indemnités non affectées à la réparation de l’ouvrage.

Le moyen n’est donc pas fondé.

 

Cass. Civ. 3e, 13 avr. 2023 ; Pourvoi n° 19-24.060