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SERVITUDE : Conditions de déplacement de l’assiette d’une servitude conventionnelle de passage – Commodité égale pour le propriétaire du fond dominant – Méconnaissance des prescriptions d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles (non)

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Si le propriétaire du fonds assujetti entend transporter l’exercice de la servitude dans un endroit différent de celui où elle a été primitivement assignée, il ne peut, en vertu de l’article 701, alinéa 3, du code civil, proposer comme nouvelle assiette qu’un endroit aussi commode et ne peut donc méconnaître les prescriptions d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles prévu par l’article L. 562-1 du code de l’environnement

MM. [R], [T], [V], Mme [G] et les sociétés civiles immobilières Vista Piana, Altu Sole et Abricor (les SCI), se prévalant d’une servitude conventionnelle de passage, ont assigné M. [Z], propriétaire du fonds servant, en rétablissement de la servitude, dont celui-ci avait déplacé l’assiette.

La Cour d’appel avait rejeté la demande tendant à voir condamner M. [Z] à la remise en état et à l’ouverture de la servitude conventionnelle primitive, aux motifs que l’assiette originelle de cette servitude n’avait pas été mise en conformité avec le plan de prévention des risques naturels prévisibles « incendies de forêt » de la commune de Lumio par les propriétaires des fonds dominants auxquels cette charge s’imposait au titre de leur obligation d’entretien et que la production des pages concernant les projets nouveaux de construction ne justifiait pas l’applicabilité dudit plan à une servitude ancienne existant antérieurement au mois de décembre 2014. 

Le pourvoi reprochait à la Cour d’avoir statué ainsi, alors « que le plan de prévention des risques naturels prévisibles « incendies de forêt » de la commune de Lumio limite la pente en long à 20 % en zone rouge. Or la nouvelle assiette de la servitude litigieuse datant de 2017 comporte une pente de plus de 20 % et qu’elle n’est donc pas conforme, à l’arrêté n° 2272015 du 11 août 2015 portant approbation du plan de prévention des risques naturels « incendies de forêt ».

Au visa de l’article 701, alinéa 3, du code civil, la Cour de cassation rappelle que si l’assignation primitive de la servitude est devenue plus onéreuse au propriétaire du fonds assujetti, ou si elle l’empêche d’y faire des réparations avantageuses, il peut offrir au propriétaire de l’autre fonds un endroit aussi commode pour l’exercice de ses droits, et celui-ci ne peut le refuser.


Pour rejeter la demande de MM. [R], [T], [V], Mme [G] et des SCI, l’arrêt relève que, si la nouvelle assiette comporte une pente de plus de 20 %, en méconnaissance des prescriptions du plan de prévention des risques naturels « incendie de forêt » de la commune de Lumio, ni la nouvelle, ni l’ancienne assiette ne sont conformes à ce plan en ce qui concerne la largeur du passage.


La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel pour ne pas avoir tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en lui reprochant d’avoir statué ainsi, alors que si le propriétaire entend transporter l’exercice de la servitude dans un endroit différent de celui où elle a été primitivement assignée, il ne peut proposer comme nouvelle assiette qu’un endroit aussi commode et ne peut donc méconnaître les prescriptions d’un plan de prévention des risques naturels.


Cass. 3° civ., 25 janv. 2024 ; Pourvoi n° 22-16.920