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BAIL COMMERCIAL – Vente de la chose louée – Droit de préférence du preneur à bail – Domaine d’application – Exclusion – Cas – Local ne constituant qu’une partie de l’immeuble vendu

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Il résulte de l’article L. 145-46-1 du code de commerce que le locataire à bail commercial ne bénéficie pas d’un droit de préférence lorsque le local pris à bail ne constitue qu’une partie de l’immeuble vendu

Cass. 3e Civ. 19 juin 2025 ; Pourvoi n° 23-19.292

Pour aller plus loin :

Contexte de l’Affaire et Article L. 145-46-1 du Code de Commerce

Cet arrêt concerne l’application du droit de préférence (ou droit de préemption) du locataire commercial, prévu par l’article L. 145-46-1 du Code de commerce. Cet article vise à protéger le locataire en lui offrant la possibilité d’acheter en priorité le local qu’il loue lorsque le propriétaire décide de le vendre.

Cependant, cet article comporte des exceptions, et c’est l’interprétation de l’une de ces exceptions qui est au cœur de cette affaire.


Les Positions en Présence

Position de la Cour d’Appel

La Cour d’appel a rejeté la demande de la locataire en nullité de la vente. Elle a constaté que la vente ne portait pas uniquement sur le local commercial loué par la société Assistance et gestion intégrale, mais sur plusieurs lots (cave, boxes, et le lot de bureaux dont une partie seulement était louée).

La Cour d’appel a interprété l’article L. 145-46-1 comme excluant le droit de préférence du locataire en cas de « cession unique de plusieurs locaux d’un ensemble commercial et de cession unique de locaux commerciaux distincts ». En substance, elle a considéré que dès lors que le local loué ne représentait qu’une partie de l’ensemble vendu, le droit de préférence ne s’appliquait pas.

Position du Pourvoi (la Locataire)

La société Assistance et gestion intégrale, locataire, a formé un pourvoi en cassation, reprochant à la Cour d’appel d’avoir violé l’article L. 145-46-1 du Code de commerce.

Elle soutenait que le droit de préférence n’est exclu que dans des cas précis, notamment la cession unique de plusieurs locaux d’un ensemble commercial ou la cession unique de locaux commerciaux distincts. Pour la locataire, la vente en question ne correspondait à aucune de ces exceptions. Elle mettait en avant le fait que la cession portait principalement sur un seul local à usage de bureaux, même si d’autres lots (cave et box) étaient inclus. Le fait que seulement une partie du lot de bureaux soit louée ne devrait pas, selon elle, priver le locataire de son droit de préférence.

La locataire arguait que la Cour d’appel n’avait pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en élargissant l’exception du droit de préférence au-delà des cas expressément prévus par la loi.


La Solution de la Cour de Cassation

La Cour de cassation rejette le pourvoi de la locataire et confirme la décision de la Cour d’appel.

Elle rappelle que l’article L. 145-46-1, dans son dernier alinéa, prévoit que les dispositions relatives au droit de préférence ne sont pas applicables à la cession globale d’un immeuble comprenant des locaux commerciaux.

La Cour de cassation va plus loin en précisant que cette exception s’applique même en cas de cession d’un immeuble comprenant un seul local commercial. L’élément clé de sa décision est la phrase suivante : « Il en résulte que le locataire à bail commercial ne bénéficie pas d’un droit de préférence lorsque le local pris à bail ne constitue qu’une partie de l’immeuble vendu, même si celui-ci ne comprend qu’un seul local commercial. »

En l’espèce, la Cour de cassation constate que les locaux loués par la société Assistance et gestion intégrale ne constituaient qu’une partie des lots objets de la vente (le lot de bureaux partagé et d’autres lots comme les caves et boxes). Par conséquent, la Cour d’appel a eu raison d’en déduire que la locataire ne bénéficiait pas du droit de préférence.