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COPROPRIÉTÉ : l’obligation du syndicat de mettre en demeure son copropriétaire de remédier aux désordres

COPROPRIETE : l’obligation du syndicat de mettre en demeure son copropriétaire de remédier aux désordres et la prescription acquisitive d’une servitude de vue malgré l’illicéité des moyens mis en œuvre.

Sommaire :

L’absence de déclaration préalable d’urbanisme et le défaut d’autorisation des travaux de percement du mur extérieur d’un immeuble soumis au statut de la copropriété par l’assemblée générale des copropriétaires ne font pas obstacle à l’acquisition par prescription d’une servitude de vue sur le fonds voisin.

Pour aller plus loin :

M. [B], propriétaire d’un lot à usage professionnel au rez-de-chaussée de la résidence Port des sables, soumise au statut de la copropriété, a créé dans le mur extérieur de cette résidence plusieurs ouvertures donnant sur le fonds appartenant au syndicat des copropriétaires de la résidence Le Soleil et a aménagé une terrasse sur ce fonds.

Le syndicat de la résidence Le Soleil a assigné le syndicat des copropriétaires de la résidence Port des sables en suppression desdites ouvertures et en cessation de l’empiétement. Celui-ci a appelé en intervention forcée M. [B].

Le syndicat de la résidence Port des sables fait grief à l’arrêt de le condamner, in solidum avec M. [B], à fermer les ouvertures, à supprimer tout empiétement sur le fonds appartenant à la copropriété résidence Le Soleil, à restituer aux lieux leur état initial et à payer au syndicat de la résidence Le Soleil une certaine somme à titre de dommages-intérêts.

1°) Sur la faute du syndicat des copropriétaires de ne pas avoir mis en demeure son copropriétaire de remettre en état le mur percé

Le syndicat des copropriétaires, qui a pour objet la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes, est responsable des dommages causés aux tiers par le vice de construction ou par le défaut d’entretien des parties communes.

La cour d’appel considérait que le fait, pour le syndicat des copropriétaires de la Résidence Port des sables, de ne pas avoir mis en demeure M. [B] de remettre en état le mur dans lequel celui-ci avait pratiqué une ouverture, constituait une négligence « en relation de cause à effet avec le préjudice » invoqué par le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Soleil, à savoir un empiétement sur sa propriété, de sorte que le syndicat des copropriétaires de la résidence Port des sables devait être condamné in solidum avec M. [B] à réparer ledit préjudice

Cependant l’empiétement litigieux est dû à l’installation par M. [B] d’une terrasse empiétant sur le fonds de la résidence Le Soleil et non à l’ouverture pratiquée dans le mur de clôture de la Résidence Port des sables, ce dont il résultait qu’il n’existait aucune relation de cause à effet entre la prétendue négligence imputée au syndicat des copropriétaires de la Résidence Port des sables et le préjudice invoqué par le syndicat des copropriétaires de la Résidence Le soleil.

La cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir retenu qu’il appartenait au syndicat de la résidence Port des sables, informé des ouvertures pratiquées par M. [B] dans un mur partie commune de la copropriété sans son autorisation, donnant sur le fonds voisin appartenant à la résidence Le Soleil et susceptible de préjudicier à cette dernière, de le mettre en demeure de rétablir les lieux dans leur état initial.

Ayant ainsi caractérisé la faute du syndicat de la résidence Port des sables dans la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes, elle a pu retenir que cette négligence fautive avait contribué à la réalisation du préjudice invoqué par le syndicat de la résidence Le Soleil, résultant de l’atteinte à son droit de propriété et des troubles anormaux de voisinage générés par l’activité commerciale des locataires de M. [B] et en déduire qu’il devait être condamné, in solidum avec M. [B], à le réparer.

2°) sur la prescription acquisitive d’une servitude de vue malgré l’illicéité des moyens mis en œuvre

M. [B] fait grief à l’arrêt de le condamner, in solidum avec le syndicat de la résidence Port des sables, à fermer les ouvertures, à supprimer tout empiétement sur le fonds appartenant au syndicat de la résidence Le Soleil, à restituer aux lieux leur état initial et à payer au syndicat de la résidence Le Soleil une certaine somme à titre de dommages-intérêts.

Le pourvoi rappelle que les servitudes continues et apparentes s’acquièrent par titre, ou par la possession de trente ans, et que la réalisation d’ouverture dans un mur commun sans déclaration préalable, ni autorisation de la copropriété ne constitue pas un acte illicite ou irrégulier de nature à faire obstacle à la prescription acquisitive d’une servitude de vue.

En l’espèce, une porte et deux doubles fenêtres donnant directement sur le fonds de la copropriété Le Soleil avaient été réalisées par M. [B] en 1976-1977, soit il y a plus de trente ans, mais sans avoir été précédées par une déclaration conformément aux dispositions de l’article R. 421-17 du code de l’urbanisme, ni par une autorisation écrite de la copropriété.

La cour d’appel, considérant que cette possession s’établissait sur des actes illicites ou irréguliers, avait écarté la prescription et condamner M. [B] et le syndicat Port des sables à fermer ces ouvertures et à restituer aux lieux leur état initial.

Au visa de l’article 690 du code civil, la cour de cassation rappelle que les servitudes continues et apparentes s’acquièrent par titre, ou par la possession de trente ans.

Une servitude de vue constitue une servitude continue et apparente qui existe du fait-même de la présence de l’ouverture donnant sur l’héritage d’autrui et dont la possession subsiste tant qu’elle n’est pas matériellement contredite.

La cour de cassation casse l’arrêt d’appel aux motifs que l’absence de déclaration préalable d’urbanisme et le défaut d’autorisation des travaux de percement par l’assemblée générale des copropriétaires ne font pas obstacle à l’acquisition d’une servitude de vue par prescription.

Cass. Civ. 3e , 21 avr. 2022 ; Pourvoi n° 21-12.240

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